Par Louise Comeau, Daniel Nunes, Stephen Thomas
Dans le discours sur l’état de la province, le premier ministre Higgs a annoncé un investissement de 20 millions de dollars dans la technologie des petits réacteurs nucléaires modulaires d’ARC Canada, une solution proposée au changement climatique que l’Institut canadien pour des choix climatiques (ICCC) qualifie de pari risqué.
Par le passé, le Nouveau-Brunswick a fréquemment investi dans des paris risqués qui n’ont rien donné. Alors, pourquoi ne pas couvrir nos arrières en accélérant les investissements dans ce que l’ICCC appelle des « valeurs sûres »? Selon l’ICCC, les valeurs sûres permettent de réduire aujourd’hui, et de façon rentable, les gaz à effet de serre grâce à des investissements qui mettent l’accent sur l’efficacité énergétique, le passage à une énergie propre, renouvelable et abordable et l’adoption des véhicules électriques.
Les promoteurs des nouvelles technologies nucléaires expérimentales comme les petits réacteurs nucléaires modulaires, ou PRM, minimisent la nature risquée de leur technologie en alléguant qu’il s’agit d’une valeur sûre.
Or, la technologie des PRM n’est pas une valeur sûre. Actuellement, il n’y a qu’un seul PRM opérationnel. Décrit comme un « prototype fonctionnel », ce réacteur se trouve sur une barge en Russie. Il a fallu plus d’une décennie de plus que ce qui était initialement prévu pour produire ce prototype, et on a observé des retards similaires dans le cadre de projets expérimentaux développés en Argentine et au R.-U. D’autres projets progressent, lentement, aux É.-U.
Bien que les promoteurs commercialisent les PRM en les faisant passer pour une solution de rechange aux grandes centrales nucléaires, ces réacteurs produisent tout de même de grandes quantités de déchets radioactifs dangereux. Des déchets pour lesquels nous devrons continuer de payer et d’assurer un entreposage sécuritaire, potentiellement dans plus d’endroits qu’aujourd’hui, durant au moins des centaines d’années.
Selon la Feuille de route des petits réacteurs nucléaires de Ressources naturelles Canada, il se pourrait que nous devions attendre jusqu’en 2030, au moins, avant de pouvoir tirer de l’électricité utilisable de ces projets expérimentaux. Pour lutter contre le changement climatique et conserver l’objectif planétaire d’un réchauffement maximal de 1,5°C, le Nouveau-Brunswick doit éliminer les combustibles fossiles de la production d’électricité d’ici à 2030, au plus tard.
En attendant, les énergies éolienne et solaire et l’efficacité énergétique sont des technologies éprouvées au cœur de centaines de projets menés à toutes les toutes échelles, pour toutes sortes d’applications et dans toutes les régions du Canada. Actuellement, les énergies solaire et éolienne sont les formes d’électricité les plus abordables de la Terre. Cinq fois moins chères que le charbon, cinq fois moins chères que l’énergie nucléaire traditionnelle et trois fois moins chères que le gaz naturel.*
Bien qu’il faille associer de grandes quantités d’énergies éolienne et solaire à des ressources et des technologies d’appoint, ces solutions existent déjà. Des moyens de transmission avec nos voisins qui utilisent de l’énergie hydro-électrique, et des technologies d’entreposage de plus en plus rentables existent déjà ou presque.
Pourquoi miser sur des technologies coûteuses et non éprouvées comme les PRM alors que nous pouvons choisir des options électriques propres qui constituent la solution abordable, fiable et durable à laquelle les Néo-Brunswickois ont droit?
*Ces chiffres représentent les moyennes des fourchettes données dans les récentes analyses de Lazard 14.0 https://www.lazard.com/perspective/levelized-cost-of-energy-and-levelized-cost-of-storage-2020/
Lisez notre fiche d’information: Les revendications des défenseurs de l’énergie nucléaire ne sont pas fondées
Tiré du projet Vision pour l’électricité de l’Atlantique du Conseil de conservation du Nouveau-Brunswick et de l’Ecology Action Centre